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La lumière dans les yeux

(Sole negli occhi)

un film de Andrea Porporati

David di Donatello 2002 : Meilleur son en prise directe (Remo Ugolinelli)
Annecy Cinéma Italien 2001 : Grand Prix 2001, Prix CICAE

Marco est habité par une haine profonde pour son père qui le pousse à l'assassiner. Après être passé à l'acte, il se réfugie au bord de la mer, dans un petit hôtel, parmi les vacanciers. Marco est vite repéré par la police, et l'agent Rinaldi tente de saisir les ressorts et les racines profondes de ce crime bestial et sans mobile apparent. Petit à petit, il réalise que ce meurtre peut-être lié à une blessure que le jeune homme porte en lui depuis l'enfance. Pendant ce temps, à l'hôtel, Marco fait la connaissance d'une jeune adolescente qui vit ses premiers émois amoureux

 Photos

  Fiche technique

Année 2000
Durée 96'
Langue Italien, vost
Visa 108072
Format 35mm, Couleur
Scénario Andrea Porporati
Photographie Franco Lecca
Montage Franco Lecca
Son Remo Ugolinelli
Musique Andrea Guerra
Décors Beatrice Scarpato
Costumes Beatrice Scarpato
Interprètes Fabrizio Gifuni, Valerio Mastandrea, Delia Boccardo, Emanuela Macchniz, Gianni Cavina
Production Sorpasso Film, Rai cinema

  Critiques

« Les enfants qui nous entourent, surtout les adolescents, sont presque tous des monstres. Leur aspect physique est quasi terrorisant, et quand ils ne sont pas terrorisants, ils sont fastidieusement malheureux... Ils n’ont aucune lumière dans les yeux, leur silence peut précéder une demande angoissante d’aide (quelle aide ?), ou précéder un coup de couteau. Pier Paolo Pasolini : Lettre Luterane « Sole negli occhi » de Andrea Porporati est oh combien actuel , mais cependant inactuel, comme les invectives Pasolinienne recueillies dans « Lettre Luterane ». Scénariste de Giani Amelio (Lamerica) et auteur de deux romans publiés par Mondadori, Porporati donne une lecture phénoménologique et épurée d’un délit familiale qui semble venir de la chronique (c’est l’année de Novi Ligure et de Cogne), qui pourrait s’élever à la hauteur de la tragédie grecque et qui au contraire reste au niveau de la folie quotidienne des générations, mais avec les racines historiques et sociales dont parlait Pasolini. Les fautes des pères (le « fascisme» dit le poète de Casarsa) retombent sur des enfants expropriés du sens de la culpabilité, et donc des racines humaines, concrète, de la morale. Marco (Fabrizio Gifuni) reviens chez lui dans une petite ville balnéaire de la côte romagnole et tue son père. Le délit est prémédité et mûri depuis des années, peut-être remonte-t-il à un événement traumatique et inavouable qui lie l’enfant et sa mère et auquel le père aurait assisté. Un couteau de cuisine, acheté exprès, est caché dans le sac de sport de ce jeune silencieux, inexpressif, quasi catatonique. L’homicide ouvre le film et se prolonge – atroce, maladroit et insoutenable – par une scène qui semble interminable et qui l’est effectivement. Le père (Gianni Cavina) ne se défend pas, et même il ne semble pas comprendre. Il se cache dans la salle d’eau et baigne dans son sang, comme un Jules César en plus prosaïque et moins héroïque. Dans la grande maison plongée dans la semi-obscurité et le vide d’une famille désarmé (évidemment les parents sont séparés). Marco, après avoir tué, s’endors dans sa chambre d’enfant, comme si de rien n’était. Ou peut-être soulagé. Le lendemain matin, ou peut-être plus tard dans l’après-midi, lorsque deux enfants qui jouent avec un miroir depuis leur balcon de l’immeuble d’en face le réveillent : c’est le soleil dans les yeux qui semble illuminer le coupable. En réalité le mécanisme du polar - la punition du criminel - ne se mettra jamais en route ou tournera à vide. Ce truc du soleil dans les yeux, ne fonctionne pas avec Marco qui reste impassible, impénétrable. Sans aucune lumière dans les yeux. Et qui donc ne se laisse pas punir. Avant ce faux épilogue, suivi d’un final où c’est le facteur humain qui vient à la rescousse, Marco avait quitté le lieu du crime et s’était réfugié dans une petite pension du littoral. Comme le Raskolnikov de « Crime et Châtiment » - deuxième ascendance littéraire d’un film franchement littéraire - la fièvre l’avait assailli aussitôt après comme une punition, une marque que l’enquêteur de service (le jeune policier joué par Valerio Mastendra) peut inscrire sur la main courante. A Rimini, pendant ce temps arrivent la soeur et la mère : la famille de Marco se recompose autour du cadavre qui fut un temps le chef de famille - cadavre en décomposition depuis longtemps - et autour de l’appartement, symbole typique de la petite bourgeoisie qui est un mobile à peine suffisant et pour le reste non crédible jusqu’a la fin. Marco est confronté à sa soeur et surtout à sa mère (l’inceste est suggéré dans la scène du pédalo) mais ses raisons restent volontairement non éclairées. « La raison de l’homicide est dans la séparation des êtres humains et dans les affections, dans la dictature du bonheur dans laquelle nous sommes immergé, dans l’imaginaire d’une libération de ses propres obsessions au travers de l’homicide et enfin dans le désir métaphysique de recréer une éthique ». C’est sûrement la dictature du bonheur la notion la plus présente pour expliquer le mal être structural de Marco. Fabrizio Gifuni, acteur sensible est particulièrement adapté au personnage, révèle quant a lui avoir « éviter les raccourcit de la pathologie reconnaissant un mal être , mais une maladie, un homme qui s’est senti hors du complexe humain pendant des années et qui, seulement après un délit commence à retrouver la normalité et initie un lent réveil ». En ce sens, la rencontre avec la jeune fille dans l’auberge Rimbaldien est importante. Marco s’en éprend comme un adolescent et lui confie son incapacité, son importance, la liaison avec un rachat que Porporati laisse en suspend à la finale n’est pas rassurante est justement éllithique comme un peu tous le film. Mais l’importance de Marco est l’importance politique d’une génération - celle de Porporati justement et du post Aldo Moro - qui, même pas symboliquement a osé tuer les pères comme au contraire au temps des « poings dans les poches » ou nier jusqu'à sa racine la famille modèle comme dans « Teorema ». Et quand bien même avec une certaine réticence « Sole negli occhi » parle justement de cela.

(auteur)

« Le jeune réalisateur Andrea Porporati avec son film Sole negli occhi a choisi de s’intéresser aux mystérieuses zones d’ombre qui chacun a au fond de soi, sur le mystère de la banalité du mal, sur ces personnes apparemment normales qui nous frôlent chaque jour avec le soleil dans les yeux, cachant au fond d’eux des mondes infinis, obscurs et impénétrables. « Je cherche à raconter ce qu’il y a derrière les nombreux faits divers récents, mûris dans le microcosme familial, sans raison apparente. Mon film se propose d’aller au-delà du fait divers, d’être le journal de l’âme de l’assassin...C’est en effet à travers son point de vue que se déroule le film. » « Le noeud du récit, écrit avec fluidité par l’un des scénaristes italiens les plus prolifiques, réside non seulement dans l’inquiétante question des motifs et des responsabilités qui poussent à commettre le plus horrible des crimes, mais aussi et surtout dans l’analyse jamais superficielle de la psychologie humaine au cours du difficile, et dans ce cas, dramatique, passage à l’âge adulte. Le metteur en scène porte sur l’Italie et la société de consommation un regard critique et désenchanté, en jouant sur les extrêmes normalité-folie, quotidien-exceptionnel, apparenceréalité. »

Claudia Russo

  La réalisation, Andrea Porporati

Réalisateur

Biographie

Andrea Porporati. Né en 1964 à Rome.
Avant de se lancer dans la réalisation de son premier long-métrage "Sole negli occhi", il se dédie surtout à l'écriture : il rédige des romans "La felicita imputa" (1990) et "Nessun colora" (1993), mais aussi ce-écrit des scénarios de films tels que "Lamerica", dirigé par Gianni Amelio (1994), les épisodes n°7, 8 et 9 de "La pieuvre". Il a réalisé son premier long-métrage en 1999 "The best I can do" qui a été primé au festival de Bellaria.

Filmographie

The best I can do (1999)